Gay, retraité et heureux : mode d’emploi
Parce que le jeunisme règne dans la communauté LGBT, on imagine toujours la vie de retraité gay comme plutôt difficile. Et ça peut être le cas. Mais certains vivent cette période merveilleusement bien, comme l’aboutissement d’une vie heureuse. Leçon de bonheur…
Le départ à la retraite est une date importante dans la vie de chacun. Chez les gays aussi… On a malheureusement une image un peu sombre de cette période symbole pour certains de désocialisation. Léon de Toulouse a 68 ans et il se rappelle ce moment : « J’étais professeur d’espagnol en collège. Je m’étais préparé dans ma tête à cette date. Je pensais avoir suffisamment anticipé. Et plus la date approchait, plus je commençais à paniquer. »
Et pourtant, nombreux sont ceux qui ont trouvé la solution pour vivre une retraite joyeusement, pleines de surprises et de rencontres. Et si le départ à la retraite n’était que le début d’une nouvelle vie, riche et épanouissante ? Il n’y a, selon nos témoins, pas de recettes miracles mais des pistes qui semblent fonctionner pour que cette période soit la plus heureuse possible.
Hubert a 74 ans, il habite Paris et c’est son mari Francesco (58 ans) qui l’a aidé à vivre ce moment : « Il m’a fait comprendre avec délicatesse que la retraite c’était avant tout, profiter de soi, s’occuper de son bien-être. Et c’est vrai que j’ai petit à petit pris conscience qu’il fallait que je pense à moi, alors que j’ai pensé aux autres toute ma vie. Je me suis inscrit à un cours de sport. J’ai organisé des week-ends en amoureux pour mon chéri. Je me suis mis à la cuisine, et c’était pas gagné ! »
Les uns avec les autres
Hubert et Francesco représentent bien les difficultés de la vie à la retraite : l’un a du temps, l’autre travaille encore. Hubert se rappelle d’avant : « Nous nous sommes rencontrés dans une boîte parisienne il y a 36 ans en 1984 ! J’étais médecin. Jusqu’à mon départ en retraite, j’étais, ce qu’on appelle aujourd’hui, un hyper actif. J’appréhendais cette échéance, d’autant que mon mari travaillait, et travaille, encore. »
La question que beaucoup de retraités se posent, c’est quoi faire de tout ce temps. Hubert a un peu anticipé : « J’ai commencé à faire du bénévolat. Pour les autres seniors, pour les enfants, pour les personnes en situation de handicap… J’étais devenu un peu la Mère Theresa du quartier. Je n’étais jamais seul. J’arrivais même à dire que j’étais débordé, ce qui avait le don d’agacer Francesco… Aussi étrange que ça puisse paraître, je n’ai jamais autant fait de projet d’avenir qu’actuellement. Qu’est-ce que j’attends aujourd’hui ? Que Francesco soit enfin à la retraite pour qu’on en profite ensemble tous les deux… »
Hubert et Francisco font donc des projets qui passeront d’abord par un voyage en Équateur, pays où est né Francesco.
Sea, sex and sun
On pense souvent aux voyages quand on se met à imaginer de quoi sera faite notre retraite. Léon de Toulouse (68 ans) a même pensé qu’en partant loin, il encaisserait plus facilement ce passage délicat : « Pour éviter de craquer, j’ai décidé de faire un grand voyage aux États-Unis. J’ai voulu voir les grandes villes où les gays avaient l’habitude d’aller. J’ai passé deux semaines à Key West en Floride. »
Les voyages sont souvent à l’origine de rencontres complètement inattendues. Léon se souvient : « A Key West, j’ai rencontré un couple, Harry et Jim, deux mecs de plus de 60 ans qui organisaient des fêtes entre mecs de tous âges. Ils m’ont invité à toutes leurs parties… Je me suis vraiment amusé. Comme si quelque chose en moi me disait, c’est maintenant que tu peux le faire. J’ai même eu une aventure assez hot avec un Argentin, retraité comme moi… »
Quand il est rentré en France, Léon a décidé que sa vie de retraité ressemblerait à ce qu’il avait vécu aux États-Unis. Il voyage : « Je suis allé pour la première fois à la Bear Week de Sitgès l’année dernière. C’était extraordinaire ! J’ai rencontré un homme là-bas. On a décidé de se revoir mais on va prendre notre temps. Ça tombe bien, on en a, du temps ! »
Des amis à la pelle !
Raymond a 71 ans et habite un petit village à côté de Nancy. Il a décidé, lui, de se poser : « J’ai passé ma vie à voyager professionnellement. Je n’en pouvais plus de ces grandes métropoles trop inhumaines à mon goût… Coup du destin, trois ans avant mon départ en retraite, une tante que je connaissais très peu, est décédée. J’ai hérité d’un corps de ferme un peu délabré en Lorraine. »
L’occasion pour Raymond de poser définitivement ses valises et de se lancer dans une nouvelle vie : « A ma retraite, je me suis installé en Lorraine et j’ai retapé la maison petit à petit. C’est mon chez moi, celui dont je rêvais quand j’étais en voyage professionnelle au Pérou ou au Laos… J’y suis vraiment heureux. Je passe mon temps aujourd’hui entre mon jardin, mes six chats et mon chien, et mes escapades en Belgique ou en Allemagne où j’ai beaucoup d’amis. ».
C’est d’ailleurs le conseil que donne Raymond et nos autres témoins aux futurs retraités : « Ayez un cercle d’amis très fort. La vie n’est pas forcément toujours souriante quand on vieillit mais avec des proches qui vous aiment, on peut dépasser toutes les difficultés. Aujourd’hui, je ne me sens jamais seul… Bien au contraire… ».
Vive la retraite !