TĂ©moignages : Je ne prends mon pied qu’avec des inconnus
Le plaisir a ses raisons mais aussi ses mystĂšres. Pourquoi est-on parfois bien plus Ă lâaise avec un type quâon ne connaĂźt pas quâavec un amant rĂ©gulier ? Levons-le voile pour aller titiller la mĂ©canique du dĂ©sir, avec un adepte convaincant.
Sylvain a 29 ans, il a un peu tout essayé : l’amour à deux, à trois, à beaucoup plus. Sur la plage, au sex-club ou dans le lit conjugal de monsieur quand madame était au boulot. Il a entraîné des bi curieux, des hétéros très ouverts (et pas que d’esprit), des gays coincés un jour et plein d’idées le lendemain. Ce qu’il préfère ? Les inconnus. « Moins je leur parle, plus je m’éclate. Mes vraies extases ont toujours eu lieu avec des gars dont je ne savais presque rien. » Dans le top 5 de ses meilleurs coups, aucun de ses deux ex-maris qu’il décrit comme « charmants, des gars bien sous tous rapports. »
Son plan idéal, il l’a rencontré : c’était un vendeur de fringues qui a fermé la porte de la boutique le temps qu’il fallait. « Dans une cabine d’essayage, au milieu de Besançon, dans un département où je ne mets jamais les pieds, j’étais passé là pour le boulot. » Outre les jambes d’haltérophiles et le duvet soyeux du garçon, il s’est senti plus à l’aise pour « se lâcher », nous dit-il. Mais c’est quoi se lâcher ? « Oh, ben c’est demander, prendre des initiatives, c’est aussi se laisser guider, ne pas suivre un programme… » Le mec ne lui a même pas donné son prénom, c’était inattendu, animal, il a kiffé.
Quand Sylvain a essayé, avec des rencontres sur les applis, de donner, au préalable, moult détails sur ses goûts et ses pratiques, c’est resté bien trop classique pendant : « Le mec s’emploie à faire ce qu’il a dit, j’ai l’impression qu’il suit un truc programmé, qu’il fait tout bien et ça ne décolle jamais vraiment. »
Un plan direct ou rien
Il a donc changé son texte de profil et indique chercher de l’action, en parlant le moins possible avant. Pas d’apéro, pas de présentation de la collection de jouets qui ont servi à tant d’autres, Sylvain est devenu un adepte du « plan direct sans blabla. »
Réchappée des lointaines années Minitel (ça coûtait cher, il fallait aller vite), l’expression regroupe trois particularités : on ne se parle pas trop longtemps, ni via l’appli, ni par texto, ni par coup de fil classique. On ne raconte pas sa vie (« alors tu sais, j’adore les bougies à la vanille, les chansons de Mylène et les plages bretonnes ») parce que ça ne nourrit pas forcément l’imaginaire érotique. Et surtout, on va droit au but : déshabillage rapide (ou pantalon sur les pieds, chacun son choix) et aiguisement des sens avec longues pelles baveuses ou caresses ciblées, chacun se débrouille. « Moins on est distrait, mieux c’est » ajoute Sylvain. Il se souvient d’avoir été déconcerté par un look (« mais ce string pailleté sous une combi de chantier, pourquoi ? »), la vue d’un livre sur une bibliothèque (une biographie d’Yvette Horner, eh oui, véridique) ou un son années 80 désastreux. Qui a envie de s’éclater sur les morceaux oubliables du groupe Début de soirée ?
Sylvain use d’un tas d’astuces pour faire taire les garçons et assure que ce trip est partagé, puisqu’il passe rarement 10 jours sans s’amuser. Fait-il donc partie des incasables ou de ceux qui ne rappellent jamais, même quand c’était bien ? Il n’est pas opposé au couple (libre, dans son cas) ni au fait de revoir les mecs : « Quand ça arrive, je propose un autre lieu. Si le mec testé sur l’appli une fois me rejoint au bar d’un sex-club en second rendez-vous, on descend sans se dire un mot, je redeviens sauvage. »
Son meilleur souvenir ? Un inconnu de passage, qui lui a donné rendez-vous dans 3 endroits différents, via l’appli Jock : une chambre d’hôtel un peu bas de gamme, une aire d’autoroute et les bords d’un lac. Il ne connaît pas son prénom. Mais il a parlé (quand même) pour lui demander son numéro de téléphone, aussitôt enregistré avec le pseudo, un sigle (TBC, pour « très bon coup ») et une date, pour se souvenir. Si le type repasse dans le coin, il en connaîtra l’essentiel, « son odeur, sa peau » et retrouvera ce doux état de transe, loin de la comédie sociale un peu forcée et des bonnes manières qui lui rappellent…le boulot.
Sa prochaine idée ? Les plans anonymes, sans montrer son visage. Il a d’ailleurs commencé à regarder les cagoules en lycra.