Incendie homophobe au Backstage, bar gay de Perpignan : « Heureusement, il n’y a pas eu de victimes ! »
En marge du match Maroc-Portugal du samedi 10 décembre, des supporters ont attaqué le bar gay Le Backstage à Perpignan. La voiture de l’établissement a été brûlée. Jock a rencontré Enzo, l’un des deux co-gérants…
Dans la soirée du 10 décembre, Enzo et Alain n’étaient pas encore arrivés au Backstage (Perpignan) quand ils ont reçu un appel des barmans déjà présents. Enzo raconte : « On nous a appelés pour nous dire que la voiture brûlait devant le bar… On a foncé. La police et les pompiers étaient déjà sur les lieux. Ils nous ont expliqué ce qu’il s’était passé. Des jeunes supporters sont venus jusqu’au bar pour en découdre. Il s’agit bel et bien d’une attaque homophobe. Ça fait des mois que nous subissons des intimidations de la part de ces jeunes des quartiers. Jusqu’à présent, c’était léger mais le match a été un catalyseur. Heureusement, il n’y a pas eu de victimes… » En plus de la voiture de l’établissement, deux autres véhicules juste à côté ont été brûlés. Enzo et Alain ont publié alors un message sur Facebook pour prévenir que le Backstage serait fermé le samedi soir. Mais dès le lendemain, les deux co-gérants ont tenu à ouvrir les portes.
« Plus de peur que de mal ! »
Les photos de l’incendie sont très fortes. Enzo raconte : « J’avais peur pour les serveurs qui étaient encore à l’intérieur du bar. Les pompiers ont vite circonscrit le feu. On a pu alors entrer. J’ai été rassuré : l’établissement n’avait pas du tout souffert de l’attaque. Et tout le monde était sain et sauf. Sous le choc, mais saufs. Les pompiers leur ont apporté les premiers soins, notamment la prise de sang pour savoir s’ils n’avaient pas respiré de la fumée… On a contacté les assurances qui ont pu faire retirer les carcasses des voitures brûlées le soir-même. »
Les deux co-gérants ont publié sur les réseaux sociaux : « Ce soir n’ayant l’humeur à la fête, la rue étant calcinée et pleine de mousse, nous avons pris la décision de ne pas ouvrir mais à partir de demain, le bar réouvrira en espérant que la rue aura été nettoyée. » Et Enzo et Alain ont fait le maximum pour pouvoir accueillir leur clientèle dès le lendemain.
« Nous ne plierons pas ! »
Quand on demande à Enzo s’il n’a pas envie de baisser les bras devant cette multiplication d’attaques homophobes, il répond directement : « Mais pourquoi ? Quand Alain et moi avons repris ce bar, on voulait faire perdurer l’esprit de Guillaume, l’ancien propriétaire. Il fallait qu’on soit fort au moins pour lui qui est mort [ndlr : en juillet 2020] dans son bar. » Le Backstage est devenu une institution à Perpignan grâce au travail de Guillaume mais aussi grâce à la volonté des deux actuels co-gérants d’inscrire l’histoire du bar dans celle de la communauté tout entière. Enzo précise : « Depuis samedi, nous recevons des soutiens de toutes parts. Le tissu associatif local est à nos côtés et ça fait du bien. Si nous baissons les bras, ce sera un échec pour toute notre communauté. Nous ne plierons pas face à ces intimidations. On va se relever comme on l’a toujours fait… »
« Nous ne voulons pas faire d’amalgame ! »
Pour Enzo, la seule chose qui semble certaine, c’est le caractère homophobe de cette attaque : « Quand tu te fais agresser systématiquement, qu’on te lance des pavés ou des morceaux de bois, tu es en colère. Parmi les commentaires sur notre post Facebook, il y a eu évidemment des gens qui ont fait des raccourcis. Nous ne voulons pas faire d’amalgames : les agresseurs sont des délinquants homophobes. Point final. » Enzo est un enfant de Perpignan. Il connaît sa ville, ses travers aussi mais surtout, il sait que les Perpignanais aiment leur ville telle qu’elle est : absolument diverse… Lui et Alain ont porté plainte. Jock vous tiendra au courant de la suite de l’affaire. A noter qu’une cagnotte solidaire a également été mise en place pour soutenir le Backstage.