À voir sur France 2, “Homos en France”, un doc raconté par Vincent Dedienne
En amont de la journée mondiale de lutte contre les LGBTphobies (le 17 mai), France 2 propose ce mardi 16 mai dès 21.10 une soirée spéciale avec la diffusion d’un documentaire inédit coécrit par Vincent Dedienne et Aurélia Perreau suivi d’un débat animé par Julian Bugier
Qu’est-ce qu’être lesbienne, gay, bi ou pan aujourd’hui ? Comment construit-on son identité quand on est confronté à un manque de représentations dans son adolescence, dans un environnement où l’homosexualité est toujours perçue négativement ? Comment finit-on par s’accepter pour trouver le chemin de l’épanouissement ? Autant de questions auxquelles tentent de répondre le passionnant documentaire Homos en France .
Après Noirs en France, la réalisatrice Aurélia Perreau poursuit son travail sur les communautés discriminées avec la collaboration, cette-fois, de Vincent Dedienne qui fait office de narrateur. « Je suis homosexuel et, en France, on a pas mal de mots pour le dire… il y a “pédé”, bien sûr, il y a “tarlouze”, il y a “tapette”, il y a “tafiole” que j’aime bien, moi, mais ça fait un moment que je ne l’ai pas entendu. Et puis, bien sûr, il y a “pédale”… » commence ainsi le comédien juché sur un vélo, comme un clin d’œil à ladite insulte. Une manière d’annoncer tout de suite la couleur et de montrer l’intention extrêmement louable de ne pas arrondir les angles.
10 ans après
Le doc part ainsi à la rencontre de jeunes LGBT pour connaître leur parcours. Parmi eux, Sylvain et Arwen des lycéens, Gabriel, un étudiant lyonnais, Mfaoumé un commercial de 30 ans ou encore Lou et Léo un couple de jeunes femmes. Alors, 10 ans après le vote du mariage, est-il plus simple de vivre son homosexualité ?
Car tous ont en commun d’avoir été assez grands pour vivre avec lucidité les débats sur le mariage pour tous. C’est souvent à ce moment-là qu’ils sont confrontés aux premières remarques homophobes de leurs parents. Et qu’ils commencent à jouer un rôle pour que l’homosexualité qui bouillonne en eux ne se voit pas. Ne plus croiser les jambes, contenir des gestes jugés trop féminins, prendre une voix grave plus affirmée… Le chemin est souvent le même, jonché d’incompréhension, de sentiment de rejet, mais aussi des premiers papillons dans le ventre qui donne le courage d’être soi et de faire son coming out, là où leurs ainés devaient encore se cacher.
La force de ce documentaire est aussi de mettre en écho les trajectoires de différentes générations. Aux voix de ces jeunes LGBT, répond celle de Bernard, un septuagénaire qui évoque, encore les larmes aux yeux, les thérapies de conversion : « On m’a traite de « pédé », mes parents ont réagi… Ils en ont parlé au médecin qui leur a dit : « Ça se soigne par différents traitements et thérapies. » On peut le faire devenir normal… il y avait des piqûres d’hormones mâles que j’avais toutes les semaines… Je pensais au suicide. » Bouleversant.
Pop culture
Homos en France montre aussi en quoi la culture populaire a son rôle à jouer pour lutter contre les LGBTphobies. De la première émission au milieu des années 1970 qui traitait l’homosexualité comme une maladie, aux blagues grivoises de Philippe Bouvard face à un Jean-Louis Borie qui ne se démonte pas, en passant par La Cage aux Folles ou encore à cet épisode de Dynastie qui, dans sa version française remplace délibérément un « Je suis gay » par un « Je suis malade », les LGBT d’alors n’avaient pas grand-chose de bon à se mettre sous la dent pour se comprendre et surtout se faire comprendre.
Heureusement, plusieurs décennies sont passées. Les lois ont évolué (dépénalisation, mariage), les représentations aussi – merci Queer as Folk et The L. Word. Pourtant beaucoup de stéréotypes persistent. L’homophobie intériorisée aussi. Pour les anonymes ou personnalités publiques rencontrées (à l’image d’Angèle, Jean-Baptiste Marteau, Ouissem Belgacem, Paloma qui interviennent également dans le doc), la route vers le coming out et la délivrance reste toujours soumise aux mêmes interrogations et désordres intérieurs. Elle se montre juste de plus en plus clémente.