On a parlĂ© avec Tania Dutel de son nouveau spectacle “Les Autres”

La stand-uppeuse Ă  l’humour dĂ©capant est de retour avec son nouveau spectacle « Les Autres Â». Il se joue cette semaine Ă  guichet fermĂ© Ă  la Scala Ă  Paris avant de revenir en octobre Ă  l’EuropĂ©en. Celle que l’on peut entendre aussi sur France Inter continue de se livrer sans tabou et se montre toujours aussi fĂ©ministe et LGBT friendly. Jock l’adore et a voulu la rencontrer


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De quoi parle “Les Autres” ?

Je raconte des anecdotes personnelles et intimes. J’aime bien que les gens puissent s’identifier. Je parle de “choses honteuses”. On a tous des parties honteuses dans sa propre existence. Là, j’aborde tout ! Parler sur scène devant tout le monde, de ce que l’on a généralement l’habitude de n’évoquer qu’avec soi-même, fait sauter le verrou du jugement et de la honte.

Tu as déjà eu des retours négatifs sur certaines parties de ton spectacle ?

Oui. Notamment quand j’aborde les « pertes blanches ». J’entends des « Ahhh ! ». Et contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce sont le plus souvent des femmes qui réagissent. Je pense que les hommes sont beaucoup plus ouverts que ce qu’on croit sur le sujet. Certaines femmes sont mal à l’aise avec le fait de dévoiler ce qu’elles considèrent comme un secret. Mais un truc anatomique qu’on vit toutes, ça ne s’appelle plus un secret, je crois…

On t’a déjà dit que tu avais un humour « pédé », qui utilise l’autodérision de manière un peu salvatrice ?

Déjà, je vis entourée de gays. C’est un humour qui me parle. On a le même humour. Je suis capable d’exagérer certaines anecdotes dans le spectacle mais très peu, en fait. Tout est vrai. La base de chaque point de mon show est réelle. Dans le sketch des catacombes, par exemple, je ne le dis pas dans le spectacle, mais j’étais vraiment en pleurs avant de passer dans la chatière… Le flip était vrai. Je le rends drôle, c’est tout.

Comment as-tu choisi les thèmes de ton spectacle ?

En fait, celui-là, il a fallu que je l’écrive très vite. J’ai donc fouillé très, très vite dans ma mémoire pour trouver des choses que j’avais vécues. Je ne m’autocensure jamais. Il y a certains sujets dont je n’ai pas envie de parler mais pour le reste, je n’ai pas de limites. Je m’étais un peu censurée pour mon premier spectacle. Je me suis vite rendu compte que les gens te jugent quel que soit ce que tu dis. Inconsciemment ou consciemment, d’ailleurs… Alors pourquoi t’empêcher d’aborder un sujet ? Le résultat sera le même. La seule limite que je pourrais vraiment avoir, c’est que je ne veux pas que des gens sortent de mon spectacle et se sentent blessés. J’ai trouvé la parade pour éviter ça : je parle de moi !

Aborder certains sujets peut être délicat quand même ?

Tout à fait. Mais il faut le faire avec intelligence. Ricky Gervais par exemple, parle dans son spectacle de sujets vraiment touchy. J’ai déjà entendu d’autres humoristes aborder ces mêmes sujets et il ne m’ont jamais fait rire. Avec Ricky Gervais, j’adore. Dans mon spectacle, je parle de troubles alimentaires. J’ai joué en Bretagne la semaine dernière et une femme est venue me voir pour me remercier d’en avoir parler parce que ça lui avait fait du bien. Et sur le même thème, une journaliste n’a pas aimé quand j’ai abordé la question du surpoids parce qu’elle considérait que je n’étais pas grosse. Tout est question de perception personnelle…

As-tu l’impression que les femmes sont enfin en train de prendre le pouvoir dans l’humour en France ?

Je trouve que les femmes arrivent à avoir leur place dans l’humour depuis quelques années. Elles l’ont gagné. Quand elles montent sur scène, elles défendent quelque chose ce que je ne retrouve pas forcément chez les hommes… J’ai commencé à jouer fin 2008. À l’époque, j’étais souvent la seule femme du plateau au milieu de plein de mecs. Les programmateurs des scènes ouvertes font de plus en plus attention à la parité. C’est assez nouveau.

(c) Patrick Fouque

Trouves-tu que les humoristes hommes deviennent un peu féministes ?

Tout à fait. Je ne peux pas dire que tous ont évolué, mais une grande majorité ont un regard moins violent. Certains ont encore des passages extrêmement misogynes. Et force est de constater que ça marche encore en Comedy Club. Mais il y a un avant et un après #metoo dans l’humour.

Tu es à l’aise partout quand tu joues ?

Pas toujours. A une époque, je jouais dans un endroit où il y avait des hommes qui faisaient des blagues racistes ou misogynes, qui faisaient rire le public et quand je passais après eux, je savais que j’allais me prendre un four terrible.

Tania Dutel, Les autres
Du 1er au 3 juin 2023 à La Scala, Paris (complet). À partir du 7 octobre à l’Européen. Plus d’infos et réservations

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