Témoignages : « Je ne pense qu’à ça… »
Damien et Sylvain se considèrent comme des chauds lapins. Mais alors que le premier le vit plutôt bien, le second est allé voir un médecin tant sa libido ressemblait au fond, à une addiction… Ils témoignent pour JocK sur leur gestion de leur appétit sexuel.
« La première fois que je me suis inquiété de mes pulsions sexuelles, c’était après un après-midi au sauna où j’avais enchainé les plans sans vraiment les savourer…, raconte Sylvain (39 ans, de Rennes). La seule chose qui m’excitait vraiment, c’était le nombre de mecs que j’avais dragués. » De son côté, Damien (32 ans, de Bruxelles) n’est pas particulièrement inquiet : « Il faut que je me fasse un mec pratiquement tous les jours. Là, je suis comblé. S’il arrive que je rentre bredouille certains soirs, je n’en fais pas un drame et je me dis que le lendemain sera plus fructueux… »
Deux mêmes situations pour deux conséquences différentes. Sylvain a été diagnostiqué « dépendant sexuel » par un sexologue. Il a décidé de sortir de ce qu’il appelle « sa spirale perverse infernale ». Le malaise dans lequel il plongeait petit à petit a provoqué des dommages psychologiques qu’il veut fermement guérir. L’addiction sexuelle est bien une pathologie.
Damien, à l’inverse, ne se sent même pas concerné. Pour lui, avoir des plans, même multiples, c’est comme boire des bières : « ça ne fait pas de toi un alcoolique ! ». Pourtant selon une étude américaine, presque 6% des interrogés souffrent de dépendance au sexe. Comment détecter l’addiction sexuelle ?
Des symptômes plutôt clairs
Laurent Karila est psychiatre addictologue à l’hôpital Paul Brousse, en région parisienne. Il est porte-parole de SOS Addiction. Dans un article de Ça m’intéresse, il explique les symptômes qui aident à diagnostiquer cette pathologie. Contrairement à ce que pense Damien, le nombre de partenaires n’est absolument pas un critère déterminant. « Avoir plus de 7 orgasmes par semaines pendant six mois, semble en revanche être révélateur d’une certaine addiction ».
La consommation de porno comme la masturbation sont des pratiques classiques chez les dépendants sexuels. Chez eux, la machine à imaginer tourne à plein et est capable de créer des scénarios qui peuvent devenir obsessionnels. Le dépendant sexuel n’arrive presque jamais au plaisir : il enchaine déjà sur le coup d’après et finit par ne jamais jouir vraiment.
Enfin, à part Damien et quelques autres, les personnes qui souffrent d’addiction au sexe finissent souvent par le cacher à leurs proches et à vivre une vie parallèle autour du sexe. Le secret autour de cette addiction peut amener les personnes concernées à prendre des risques…
Ça se soigne ?
Dès lors qu’on met un nom sur sa propre dépendance au sexe, on peut aller mieux. Mais on ne le fera pas vraiment seul. Une psychothérapie est nécessaire. La première étape est de consulter pour vérifier que vous êtes bien sex-addict. À quel niveau ? Sous quelle forme ? Il sera toujours utile dans le processus de guérison de déterminer si la dépendance a une origine précise. La psychothérapie varie en fonction du patient. Elle peut être accompagnée de passage parmi des groupes de paroles, de séances d’échanges, de prescriptions de régulateur d’humeur. Autant de moyens différents, voire complémentaires pour aider à s’en sortit.
Sylvain a commencé sa thérapie il y a un an : « Je vais beaucoup mieux. J’ai appris à nommer les choses : plaisir, orgasme, jouissance… Et surtout, j’ai commencé à regarder les autres non plus comme des potentiels plans à chopper, mais comme des personnes que je peux séduire, juste pour les séduire. Et rien d’autre. J’ai même envie de tomber amoureux. »
Damien, tel Don Juan, continue à écumer : « Un jour, je plairai moins. Je ralentirai de fait mes coups. Pas besoin de rendre mon plaisir, médical ! » Catégorique ou aveugle ? Lui seul le sait…