On a parlé avec Jean-Frédéric Koné du volume 2 de la bédé gay “Santa Frances”

Le volume 2 de la série à succès, une BD sur la vie et les amours d’un groupe de gays vivant dans une grande ville américaine, est disponible en prévente sur Kickstarter jusqu’au 15 Juillet 2023. Son créateur, Jean-Frédéric Koné, qui a entièrement écrit et dessiné la série, nous laisse suivre ses personnages alors qu’ils traversent des histoires d’amour, d’amitié, de sexe et bien d’autres aventures encore dans cette BD en noir et blanc cartonnée explicite de plus de 200 pages réservées aux adultes. Rencontre avec Jean-Frédéric Koné qui nous parle de ce deuxième opus, publié par les éditions Chaumington

Publié le

Propos recueillis par David Foissard, l’éditeur de la série.
Illustrations : Jean-Frédéric Koné

Tu sors le volume 2 de Santa Frances sur Kickstarter actuellement : est-ce la suite du volume 1 ou bien d’autres histoires sans lien ?

C’est bien la suite du volume 1, puisque Santa Frances est un feuilleton, qui suit la vie de quatre mecs trentenaires gays sur une période d’à peu près un an, à partir de l’arrivée de Cobb, le personnage principal, à Santa Frances, ma version fictive de l’iconique San Francisco.

Le volume 1 a rencontré un franc succès. Qu’est-ce que cela a changé chez toi en tant qu’auteur / artiste ?

Au niveau du processus de création, cela n’a rien changé du tout. Le format de mes bédés, y compris mes webcomics, a toujours été calqué sur la bande-dessinée traditionnelle, à savoir planche par planche. Par contre, ce serait mentir que de dire qu’on ne sent pas une forme de légitimité à pouvoir présenter un album physique de son œuvre lorsqu’on se décrit comme “auteur de bande-dessinée”. Donc j’ai un peu moins le syndrome de l’imposteur, et je me sens beaucoup mieux dans le choix de m’être investi à fond dans cette passion, même si celle-ci me rapportait déjà des revenus par le biais de mon Patreon, sur lequel la bédé est publiée sans censure.

Tu as pu rencontrer le public sur plusieurs séances de dédicaces, et notamment au festival de la BD d’Angoulême. Racontes-nous un peu cette expérience.

Un des aspects de la création sur le web qui diffère de la publication « traditionnelle » est que l’on est constamment en interaction avec ses lecteurs, en temps réel. Donc discuter avec le public ne m’était pas étranger, et beaucoup de ceux qui se sont présentés à mes séances de dédicaces étaient des lecteurs qui m’avaient déjà abordé sur le web. Il y a presque cette excitation de voir pour la première fois des gens avec qui on entretient une relation épistolaire.

Mais il était tout aussi excitant de rencontrer un tout nouveau public à Angoulême, dont beaucoup s’arrêtaient à notre stand par curiosité, sans préalablement connaître la série, et se procuraient le livre quand même. C’était toujours très marrant de leur décrire le projet, et de devoir préciser qu’il y a des scènes explicites.

Sans vouloir « spoiler » le volume 2, que peux-tu nous dire sur ce nouveau tome ?

Le volume 1 servait surtout à introduire les personnages, leur personnalité, ainsi que quelques-unes des problématiques qui les animent. Le volume 2 va bien plus loin, car, s’il conserve le ton comique du début, on en apprend beaucoup sur leur vie intérieure. Les lunettes roses à travers lesquelles on voyait les personnages jusqu’ici se teintent en gris puisque leurs défauts sont exposés frontalement.

Il y avait eu des réactions très fortes des lecteurs lors de la publication de certains de ces arcs narratifs sur le web, donc j’ai bien hâte de voir ce que ceux de la version papier vont en penser.

Évidemment, il y a toujours autant de moments sexy, et l’apparition de plusieurs personnages qui sont depuis devenus des fan-favorites.

La préface de ce nouveau volume est écrite par Ed Luce, le créateur de Wuvable Oaf. Comment s’est faite cette collaboration ?

Je suis un immense fan d’Ed Luce depuis que j’ai posé les yeux sur la couverture de Wuvable Oaf, il y a presque dix ans ! J’avais même écrit un essai dessus pour l’un de mes cours à la fac. Comme je suivais Ed sur les réseaux depuis un bout de temps et que j’avais dessiné plusieurs fan-arts de ses personnages, y compris des caméos de ceux-ci dans ma bédé, il connaissait un peu mon travail. Ainsi, quand j’ai vu qu’il avait participé à la campagne de financement du volume 1, je lui ai simplement demandé s’il aimerait écrire la préface du tome suivant, et à mon plus grand plaisir, il a immédiatement accepté.

Imaginons qu’une plateforme comme Netflix réalise la série Santa Frances. Quels acteurs verrais-tu dans le rôle des personnages principaux ?

Honnêtement, je n’arrive pas du tout à voir mes personnages autrement que leurs avatars dessinés. Peut-être Mike Colter en Lee ? Il est bien plus âgé mais il a certainement la carrure. Par contre, je ne connais vraiment aucun acteur qui me fait penser à Cobb, Martín ou Hoss. Sans doute parce que je n’ai pas essayé de leur donner des physiques d’acteurs Hollywoodiens. Vous aurez plus de chance de tomber sur des mecs qui leur ressemblent en vous baladant dans les quartiers gays de grandes villes qu’en regardant la télé. De toute façon, si Santa Frances devait être adapté en quoi que ce soit, je préférerais que ce soit en animation.

Tu utilises les réseaux sociaux pour publier tes histoires, mais également comme outil de promotion. Peux-tu nous en dire plus ?

Sans les réseaux sociaux, je pense que beaucoup d’auteurs LGBTQ+ ne rencontreraient pas le même succès, moi y compris ; Santa Frances n’existerait pas sans Instagram. Car nos œuvres, aussi intéressantes soient elles, restent de niche, il est donc très difficile – pas impossible, mais difficile – de se créer un public en passant par les moyens mainstream.

C’est pourquoi il est dommage de voir que les artistes queers sont constamment censurés par ces plateformes. Ainsi, mon compte Santa Frances, avec ses centaines de pages et des milliers d’abonnés avec qui j’interagissais depuis 4 ans, vient tout juste d’être effacé par Instagram, après une série de suspensions qui ont commencé au moment même où j’annonçais le lancement de la campagne de financement du volume 2 (en plein mois des fiertés).

Vu ce qui se passe au niveau des droits LGBTQ aux États-Unis, j’ai peur que ces plateformes se radicalisent aussi. J’ai la chance de savoir que ma bédé survivra sur papier. Mais il y a tant d’artistes qui partagent leurs œuvres sous la menace d’être bannis par des sites sur lesquels tout leur réseau professionnel se trouve, et souvent – comme dans mon cas – sans explication valable. Bien heureusement, la campagne Kickstarter se passe quand même bien, même si je sais qu’elle a été affectée par la disparition de mon compte, qui était un des outils de promotion principaux pour celle du volume un.

Santa Frances, vol 2
Kickstarter en cours actuellement jusqu’au 15 Juillet 2023 : http://kck.st/3CKFMDh
Instagram de Jean-Frédéric Koné : @kjfcomics
Le compte Instagram de la bédé : @santafrancescomic
Patreon de Jean-Frédéric Koné : patreon.com/santafrances

santa frances volume 2

Tu en veux encore ?