Golda Shower : “Je suis une transformiste du crĂ©puscule”
Câest une transformiste couture et une chanteuse interprĂšte. Golda Shower est lâune des artistes interviewĂ©es par Christiane SpiĂšro, dans le superbe documentaire « Les reines de la nuit » qui est sorti en salles le 4 dĂ©cembre. Entre un apĂ©ro au Labo et un show chez Michou, Golda, lĂšve le voile.
Golda fait souvent référence au passé. Est-ce une dame qui cache son âge ou une cougar coquine ?
Golda, c’est une mère d’un âge indéfini. Elle a un passé dont elle ne parle pas. C’est la maman glamour qui se prépare pour aller au théâtre le soir. Elle est asexuée, comme un petit garçon imagine sa maman, apprêtée et intouchable.
D’où vient ce nom de scène, d’un goût pour les douches dorées ?
La première idée, c’était un prénom qui brille. Gold, c’est l’or, le doré. C’est aussi le prénom de Golda Meir. Je souhaitais qu’elle soit une juive américaine. Golda Meir a grandi à Milwaukee, elle était américaine. Ensuite, je voulais une référence aux anciennes drag queens américaines qui usaient de jeux de mots, comme Anita Mann qui, prononcé rapidement, devient “I need a man” (“Je veux un mec”). Shower, je trouvais ça drôle. Beaucoup de gens ne comprenaient pas la référence. (NDLR : “golden shower” est le surnom donné aux plans uro :D) Une fois, quelqu’un a confondu avec l’après-midi dédiée du Secteur X.
Sur ton compte Facebook figurent ton véritable nom, ainsi que ton nom de scène. Pour fondre la personne et le personnage, ou être visible ?
Ma page existait avant Golda. J’ai trouvé naturel d’assurer la continuité, je n’ai pas jugé nécessaire de créer une autre page. Philippe Benhamou et Golda Shower, c’est la même personne.
Ton profil mentionne la maison de couture où tu as longtemps travaillé. Ce métier de styliste donne-t-il du corps à Golda ?
C’est ce qui me caractérise le plus en tant qu’artiste. J’ai décidé de me remettre à la couture, de créer des robes, de devenir le couturier attitré de Golda. Ce que je dessine pour elle m’a permis de lui donner un style. Golda ne porte pratiquement que des robes longues, avec un style inspiré du Hollywood des années 40, et de la haute couture de la période entre 50 et 70, avec une référence actuelle. Je continue d’ailleurs à créer des robes pour des cabarets et des artistes transformistes.
Te souviens-tu de ta première sortie de nuit, quand Golda n’était pas née ?
La toute première, j’avais 13 ans, c’était dans un cabaret discothèque, avec mes parents. J’ai vu “Les aristocrates”, des transformistes, à Agadir, au Maroc, j’étais fasciné. Ensuite, c’était à Montréal, à 17 ans, avec un camarade de classe, dans une discothèque appelée The jardin. Je suis rentré dans une salle immense avec 500 gays qui dansaient, faisaient la fête, s’embrassaient. Tout d’un coup, les choses paraissaient simples, je me suis senti comme tout le monde pour la première fois.
Quel artiste t’a donné envie chanter sur scène ?
C’est le premier transformiste que j’ai vu chanter, Lulu, qui imite exclusivement Dalida, depuis 40 ans. Lors d’un mini récital au Club 18, elle chantait en direct et plaisantait avec le public. J’ai su que c’était ce que je voulais faire.
Au Labo, tu commences à chanter le samedi à l’heure de l’apéro. Golda est-elle une artiste de jour ?
Golda est une transformiste du crépuscule. Elle apparaît entre chien et loup et disparaît avant minuit, sans jamais perdre un soulier.
Le film “Les Reines de la nuit” apprend des choses sur l’envers du décor en laissant intacte une part de magie !
Tu fais partie des artistes interviewées par Christiane Spièro, dans le très joli documentaire Les Reines de la nuit (sortie le 4 décembre). Dirais-tu que ce travail est celui qui manquait pour rendre hommage à ce métier ?
J’ignore s’il manquait, mais ce film m’a appris, en tant que spectateur, des choses sur les 12 autres artistes interviewés et sur moi-même. Il apprend des choses sur l’envers du décor en laissant intacte une part de magie.
Comment se porte la nuit parisienne, aujourd’hui, selon toi ?
Je trouve la nuit parisienne merveilleuse. Lors des rares occasions où je sors, je vois une jeunesse extraordinaire, un renouveau, une aisance chez les jeunes, une vraie modernité et une vraie mode. Dans un bar, j’ai vu des garçons et des filles habillés dans le style années 80, avec des vêtements piqués à droite à gauche, des coupes de cheveux en dehors des diktats de la mode. L’énergie est exceptionnelle et folle. Au Labo, où je travaille, viennent des jeunes qui sont pour moi des enfants. Je ressens leur incroyable créativité, leur joie de vivre. lls connaissent tout de leur époque et sont à la fois respectueux et curieux de ce qui existait avant eux.