Kirk Douglas : ces moments où il a flirté avec l’homosexualité
Star de l’âge d’or de Hollywood, acteur progressiste très engagé, Kirk Douglas est mort cette nuit à l’âge de 103 ans. Son prestigieux parcours l’a parfois amené à croiser l’homosexualité.
Au cours de sa très longue carrière — son premier film date de 1946, son dernier, un téléfilm, de 2008 —, Kirk Douglas n’a jamais joué de gay, ou de personnage potentiellement homo. L’allusion la plus directe est peut-être contenue dans un de ses films tardifs, la comédie policière Coup double (1986). Il y joue un gangster qui sort de prison au bout de trente ans et qui découvre, avec son vieux complice Burt Lancaster, que le monde a follement changé, à l’image de leur ancien bar préféré devenu un bar gay…
Bien avant cela, il avait partagé l’affiche de son premier film, L’Emprise du crime (1946), avec une actrice aujourd’hui bien oubliée, Lizabeth Scott, dont la carrière fut brisée à cause de rumeurs d’homosexualité qu’elle ne démentit jamais. Quelques années plus tard, son personnage de La Femme aux chimères (1950) est marié à une Lauren Bacall dont toutes les caractéristiques indiquent qu’elle est une lesbienne à une époque où c’était impossible à dire plus directement à l’écran. Le western La Captive aux yeux clairs (1952) est assez habile pour laisser filtrer, via des regards sensuels et des rapprochements physiques assez étonnants, une certaine ambiguïté entre son personnage et celui du jeune Dewey Martin.
Des huîtres ou des escargots ?
Comédien très physique n’hésitant jamais à mettre en avant son corps sculpté, Douglas irradie de virilité dans des films d’aventure très dépoitraillés comme Ulysse ( 1954), Les Vikings (1958) et surtout Spartacus (1960).
Il s’engagea fortement pour que ce film consacré à une révolte d’esclaves dans la Rome antique puisse voir le jour, allant jusqu’à le produire. Il faut dire que cette histoire rejoignait ses engagements politiques de gauche en faveur des défavorisés et des minorités — Kirk Douglas fut ainsi très actif pour soutenir le mouvement pour les droits civiques des Noirs. Pour Spartacus, non seulement il défendit bec et ongles le réalisateur, Stanley Kubrick, et sa vision, mais il imposa au générique le nom d’un scénariste banni depuis des années par la chasse aux sorcières anticommuniste du sénateur ultra conservateur McCarthy (un des modèles de Donald Trump…) : Dalton Trumbo. Un acte de bravoure qui marqua le début de la fin pour le maccarthysme.
Kirk Douglas ne parvint toutefois pas à empêcher la censure qui régnait à Hollywood de faire retirer du film une séquence très homosensuelle, au cours de laquelle un sénateur romain (l’acteur bi anglais Laurence Olivier), presque nu dans son bain, drague son jeune esclave Tony Curtis (quasi nu lui aussi) en lui disant qu’on peut aimer aussi bien les huîtres que les escargots… Il faudra attendre 1995 pour que cette scène d’anthologie soit rajoutée dans une version intégrale du film.
“Être contre les mariages des couples de même sexe, c’est être contre l’amour”
Au-delà des rôles, Kirk Douglas s’impliqua toujours dans la vie politique de son pays. Jusqu’à ces dernières années, il tenait un blog sur lequel il commentait l’actualité. En 2013, à 96 ans, il y prit ainsi position en faveur du mariage gay.
“J’ai eu le plaisir de lire en première page du New York Times un article à propos de mon ami, le rabbin David Wolpe,écrivait-il. Il a pris récemment la décision courageuse d’officier à des mariages de couples gays maintenant que les mariages de même sexe sont légaux en Californie. (…) Beaucoup dans la congrégation l’ont critiqué. Ils ne réalisent pas qu’être contre les mariages des couples de même sexe, c’est être contre l’amour.”
Dernière superstar de l’âge d’or de Hollywood, Kirk Douglas laisse derrière lui non seulement des chefs-d’œuvres (Les Sentiers de la gloire, Les Ensorcelés, 20 000 lieues sous les mers, L’Arrangement…), mais aussi un fils, Michael Douglas, grand acteur engagé lui aussi, qui brilla de tous ses feux dans le flamboyant Ma vie avec Liberace.