Un hétéro peut-il participer à « RuPaul’s Drag Race » ?
C’est la question qui taraude les médias LGBT et les réseaux sociaux américains depuis que RuPaul a annoncé la présence de Maddy Morphosis parmi les candidates de la quatorzième saison de son émission diffusée depuis la semaine dernière aux Etats-Unis. Car oui, Maddy est hétéro et ça ne plait pas à tout le monde…
Il est de bon ton de critiquer nos stars. On veut d’abord qu’elles soient irréprochables et en même temps, qu’elles participent de l’évolution de la communauté LGBT+. C’est le cas de RuPaul qui a chaque nouvelle saison de son émission reçoit un flot de critiques justifiées (ou non). Et la reine des drag queens se défend systématiquement avec talent. Mais aussi avec maladresse comme ce fut le cas quand elle a choisi de faire participer pour la saison 9 en 2017, Peppermint, la première femme transgenre à avoir fait son coming out avant l’émission. RuPaul s’était alors fendu pour justifier du délai pour cette révolution du drag, d’un : « Le drag perd son sens de l’ironie quand ce ne sont pas des hommes que le font ». Les associations LGBT+ ont hurlé. RuPaul s’est excusé. Dont acte. D’autant que deux candidates ont, de la même façon, défrayé la chronique du show : Gottmilk, un homme transgenre, qui a excellé lors de sa participation dans la saison 13 et Victoria Scone qui est lesbienne et a participé à RuPaul’s Drag Race UK de cette année. A chaque nouvelle saison, les polémiques arrivent et RuPaul semble aimer ça… C’est le cas avec Maddy Morphosis…
Les puristes s’insurgent…
Il n’a pas fallu longtemps pour que les réseaux sociaux s’enflamment après l’annonce de l’arrivée de Maddy Morphosis dans l’émission. Ils mettent souvent en avant l’absence de discriminations que subissent les hétérosexuels comme ce tweet, par exemple : « Il ne vaudrait mieux pas que Maddy se pointe en larmes au confessionnal en disant qu’il n’est pas accepté par la communauté ou que les filles ne l’aiment pas. » Pour ces puristes, le drag est affaire de gays uniquement. Un garçon hétéro ne pourrait pas avoir le second degré et tout le bagage historique du monde des drag queens. Certains s’interrogent sur les discussions au sein de la work room où les drags parlent de l’homophobie souvent tragique qu’elles ont vécu… Que viendrait faire un hétéro dans ces discussions ? Est-ce que les Queens vont passer outre ? Il faudra attendre l’épisode de cette semaine (pour les Américains…) pour savoir si la magie opère…
Deux soutiens de poids
En attendant, Maddy Morphosis a reçu deux soutiens parmi la communauté drag américaine. Celui d’abord de la candidate de l’an dernier Gottmilk. Gottmilk a vécu un peu la même chose que Maddy Morphosis lors de sa participation au RuPaul’s Drag Race. Beaucoup se sont demandés ce que venait faire un homme transgenre parmi les drag queens. Et tout au long des épisodes, le doute a disparu tant Gottmilk était excellent et parfait au point de finir deuxième du concours. Lors d’une interview au Variety, la drag a apporté son soutien à Maddy : « Le drag est pour tout le monde. C’est une forme d’art. Ce n’est pas une question d’identité ! »
L’autre drag qui a apporté son soutien à Maddy Morphosis est Lady Bunny. L’amie de Bianca Del Rio et la reine incontestée des drags new-yorkaises a rappelé que les droits LGBT+ étaient fragiles et qu’il fallait se battre pour qu’ils durent au lieu de se poser des questions absurdes sur la légitimité, ou non, d’une présence au sein d’un concours : « Maddy a sa place ! »
Et si le drag, c’était d’abord l’acceptation de la différence ?
Ce que les soutiens à Maddy Morphosis soulignent d’abord, c’est que le RuPaul’s Drag Race est le miroir de nos propres différences. Contester la présence de tel ou tel participant, c’est construire d’une certaine manière, une forme d’exclusion alors que le principe du drag même, est justement d’inclure en montrant une vision drôle et caustique de la communauté certes, mais aussi en rappelant que ces drag queens sont des vecteurs de tolérance. Quand Trinity K. Bonet a fait son coming out de personne séropositive en 2014, lors de la saison 6, elle a, à sa façon, lutté contre les préjugés et contre la sérophobie dont souffre de nombreux gays séropos. La dernière saison de RuPaul’s Drag Race, All Stars a vu la victoire de la première drag queen transgenre : Kylie Sonic Love. Avec l’arrivée de Maddy Morphosis, RuPaul entend montrer que son show est d’abord un show de tolérance, et ce, pour tout le monde… Même les hétéros.