Erwann Le Hô : “Avec le Rainbow Festival, nous allons faire de Nice la capitale arc-en-ciel de la Méditerranée”
À l’occasion du 17 mai, le centre LGBT de Nice Côte d’Azur organise un grand festival sur 4 jours pour sensibiliser aux LGBTphobies. Au programme : des rencontres / débats, un village associatif, des moments de convivialité et une marche militante, le dimanche après-midi. Erwann Le Hô, coordinateur du Centre, nous présente l’événement.
Peux-tu te présenter et nous rappeler ton implication au sein du centre LGBTQIA+ Côte d’Azur où tu officies depuis 7 ans ?
Bien sûr ! J’ai été président du Centre LGBTQIA+ Côte d’Azur de 2016 à 2022. Depuis l’été dernier, j’en suis le coordinateur salarié, coordonnant à la fois l’activité du Centre et ses projets, ainsi que l’offre de soins du 8 Baquis, l’espace de santé sexuelle expérimental que nous avons engagé à Nice avec le Département des Alpes-Maritimes. Je suis également vice-président du COREVIH Paca-Est, coordination régionale de lutte contre le vih, et président de l’association “Objectif sida zéro” qui a pour mission de soutenir financièrement des projets locaux en santé sexuelle.
À l’occasion du 17 mai, vous organisez le premier Nice Rainbow Festival. D’où est venue l’idée ?
En lien avec la Journée Internationale de lutte contre les LGBT+ phobies, et aussi avec les dix ans du mariage pour tous, le Centre LGBTQIA+ Côte d’Azur a souhaité donner une plus grande ampleur à ce qu’il proposait chaque année pour populariser nos valeurs, nos combats et valoriser celles et ceux qui localement s’engagent pour défendre une ville plus inclusive, porteuse d’un modèle de vivre ensemble qui promeut le respect, repousse les discriminations et permet à chacun-e de trouver sa place. Ainsi est née la première édition du Nice Rainbow Festival qui se tiendra du 17 au 21 mai 2023.
Il s’agit pour nous de valoriser et de faire connaitre aussi au grand public les organisations et les associations qui peuvent répondre à leurs questions, et nous voulons faire ce travail de valorisation dans une ambiance populaire et ludique, familiale, festive et ouverte.Une quarantaine de partenaires et des dizaines de bénévoles et d’artistes sont à nos côtés et nous sommes soutenus notamment par la Ville de Nice et la Région SUD. Nice souhaite être une capitale verte et bleue, nous allons en faire, dans la bonne humeur, la capitale arc-en-ciel de la Méditerranée le temps de ces quelques jours !
Quels seront les temps forts de l’événement ?
Nous commencerons le mercredi 17 mai par une soirée d’ouverture consacrée à la montée des LGBT phobies en Europe en compagnie d’une députée européenne et de Sébastien Tüller, référent LGBTI à Amnesty International.
Le jeudi proposera un Apéro musical Collectif Queer au Centre LGBTQIA+ et une soirée de projections de courts métrages.
Le vendredi soir, nous organisons, en partenariat avec les commerçants de la place du Pin, une grande soirée caritative et festive : une Course en Talons au profit de Sidaction. Ce sera drôle, désopilant et ce sera pour la bonne cause !
Le point d’orgue est le Village du Nice Rainbow Festival qui se déroulera samedi 20 mai, au Jardin Albert 1er de 10 heures à 20 heures, en plein centre-ville de Nice. Une vingtaine de stands associatifs, des animations, des démonstrations de danse, de self-défense, des troupes carnavalesques, une licorne géante, des jeux de rôle, des expositions attendent nos visiteurs tout au long de la journée.
Deux tables rondes seront proposées : l’une à 14 heures sera consacrée au thème ” droits, santé et la visibilité des personnes trans : nouvel horizon des droits LGBT+?”, une autre à 16 heures sur le sujet ” Mariage pour tous : dix ans après, le calme après la conquête ?” . Des personnalités notamment comme Vincent Autin, premier marié gay de France, l’avocate engagée Caroline Mecary, Christophe Martet, président de Vers Paris sans sida et ancien président d’Act Up, Flora Bolter, co-directrice de l’observatoir LGBT de la Fondation Jean Jaurès, la photographe Olivia Ciappa… interviendront à ces tables rondes.
La journée se terminera sur place par un apéro festif en compagnie des deux DJ Fredsky et Lô. Et le dimanche, il y a la marche ! L’intégralité du programme est consultable sur le site web officiel du festival : nicerainbowfestival.fr.
Le dimanche aura lieu une marche engagée contre les LGBTphobies. En quoi est-elle complémentaire de la Pink Parade ?
En effet, le dimanche 21 mai, nous organiserons une grande marche pour le respect et contre les LGBT+ phobies. Rassemblement à 14 heures place Massena, pour un départ vers 15 heures. Cette marche est complémentaire avec la Pink Parade qui se tiendra cet été. Face aux réactionnaires qui en veulent à nos droits et s’attaquent notamment en ce moment aux personnes trans ou aux artistes drag-queens, il faut faire face. Il n’y aura jamais assez de marches pour riposter et affirmer que aucun-e d’entre nous ne rentrera dans le placard !
De l’extérieur, Nice paraît plutôt LGBT friendly entre ses nombreux événements (In&out, le Queernaval, la Dolly Party), ses établissements ou encore la charte Nice irisée pour améliorer l’accueil des touristes LGBT…
En effet, il y a localement un réseau d’acteurs engagés sur les thématiques LGBT+ ou dans la santé sexuelle, la prévention, les droits des femmes et des minorités. Ces acteurs sont complémentaires dans leurs spécialités, se parlent, se respectent et innovent ensemble. Je ferai tout de mon côté pour aider à favoriser ce travail en bonne intelligence parce qu’il permet de produire de la visibilité, des solutions d’entraide, du lien social et des services pour les personnes LGBT+, leurs familles et toutes celles et ceux qui peuvent en avoir besoin à un moment de leur vie. Nous sommes effectivement soutenus par les collectivités, Ville de Nice, Département des Alpes-Maritimes, région SUD qui reconnaissent notre engagement et le sérieux de notre travail.
Et quels seraient pour toi les axes d’amélioration ?
Il y a toujours des axes d’amélioration dans notre travail collectif. Les LGBT sont des personnes plus stigmatisées, plus isolées, plus précaires que la moyenne : nous travaillons cette année notamment à renforcer les moments de convivialité et à pouvoir mieux assurer de l’hébergement d’urgence.
Comme tu l’as évoqué, tu es également président de « Objectif sida zéro : Nice et les Alpes Maritimes s’engagent » et coordinateur du centre de santé sexuelle. En quoi consistent vos actions ?
En tant que coordinateur du Centre LGBTQIA+ Côte d’Azur, je m’occupe en effet de développer l’offre de soins du 8 Baquis que nous avons engagée en janvier 2022. Il s’agit d’une expérimentation pilote prévue pour un an et, devant le succès de la première année et les bons résultats de notre enquête qualitative, nos financeurs ont choisi de nous soutenir pour mener en 2023 une deuxième année d’expérimentation. Près de 500 personnes sont venues au moins une fois au 8 Baquis en 2022, un tiers des venu-e-s a moins de trente ans et le bouche à oreille a bien fonctionné notamment dans les communautés trans.
Il s’agit d’un espace de santé sexuelle faisant intervenir des professionnel-le-s de santé communautaires et/ou formé-e-s aux enjeux du VIH et de la santé sexuelle des personnes LGBT+ qui sont parmi les publics les plus exposés au VIH. On peut venir s’y faire dépister au VIH et aux IST. Nous y proposons de la PrEP, des consultations également de psychologie, d’addictologie, de réduction des risques chemsex, de gynécologie trans et lesbienne, le suivi hormonal des personnes trans et la prise en charge des parcours de transidentité.
Il s’agit aussi d’un lieu de transmission, d’échanges et de formation entre intervenant-e-s de différentes génération et nous avons le plaisir de voir que le projet est attractif pour un certain nombre de jeunes médecins. Le 8 Baquis, que nous continuons d’affiner et de développer, est un outil pertinent dans l’ “Objectif sida zéro” local que nous nous sommes donné, à savoir la fin du VIH d’ici à 2030.